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« Les entreprises ont tort de ne pas recruter de seniors »

Les derniers chiffres du chômage indiquent qu’il y a d’avantage de seniors actifs mais qu’ils sont également plus nombreux en recherche d’emploi. Comment analyser ce phénomène ?

Interview de David  Spire fondateur du cabinet de recrutement Managers 50

Par JEANNE DUSSUEIL

C’est la conséquence directe du prolongement de l’âge de départ à la retraite, mais pas seulement. Si on recense aujourd’hui plus de seniors actifs, c’est aussi parce que les mentalités ont évolué. On constate désormais une vraie envie de travailler chez les Français de plus de 55 ans. Mais, vues la conjoncture et la mauvaise santé du marché de l’emploi, cette envie ne peut pas être facilement satisfaite. Les entreprises prennent moins le risque d’embaucher un senior. Ils lui préféreront un salarié moins âgé qu’il juge, à tort, plus immédiatement opérationnel qu’un senior.

  • A tort ?

Oui, les entreprises ont tort de ne pas recruter de seniors. La grande expérience qu’ils peuvent apporter est tout à fait adaptée pour répondre à leurs besoins urgents. Il sera par exemple parfait pour mener à bien une restructuration. Un senior a aussi d’excellentes capacités d’encadrement dans la mesure où il est capable de prendre plus de recul sur la situation. On note également chez lui une absence de carriérisme ce qui le rend beaucoup plus conciliant et adaptable. Enfin, le senior est plus mobile car ses enfants généralement sont grands et indépendants. Ils peuvent ainsi répondre à des offres de poste à l’international où ils ont une vraie carte à jouer, à la condition qu’ils parlent l’anglais couramment. C’est d’ailleurs l’un de leur point faible ; leur maîtrise de l’anglais est souvent insuffisante.

  • Quels postes et secteurs recherchent-ils en particulier ?

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ils ne sont pas fermés du tout. Ils ont certes encore inscrit sur leur carte de visite une fonction fixe (DRH, DA, directeur des achats, etc.), mais ils ne sont pas difficiles. Souvent, ils acceptent un poste à des fonctions inférieures. En termes de contrat, certains visent des postes de « pur managers en transition » et recherchent uniquement des missions de consultant très ciblées. Mais nous essayons de les inciter à regarder du côté des CDI ou des CDD.

L’industrie est très demandeuse parce qu’elles traversent actuellement des problématiques de restructuration complexes. Dans ce secteur les besoins en cadres français sont importants notamment dans les pays émergents, l’Inde, le Brésil ou encore le Canada qui sont de véritables « mines d’or » pour eux.

  • Choisir de recruter un senior, est-ce du coup aussi nécessairement fermer la porte à un jeune ?

C’est assez vrai chez les non cadres, mais pas parmi les cadres, car ce ne sont pas du tout les mêmes postes qui sont proposés. Je dirais même le contraire : plus on embauche de seniors, plus il y a de chance que des jeunes soient recrutés dans la foulée. Le senior embauché pourra en effet assurer l’encadrement des jeunes et les aider à prendre leurs marques.

  • Comment un senior vit-il les périodes de chômage ? Les affrontent-ils différemment qu’un jeune, par exemple ?

Oui, il les vit différemment. Au chômage à 55 ans, ils ne savent plus comment faire et se sentent parfois perdus avec les nouveaux outils de recherche d’emploi que l’on trouve sur internet. Dans les premiers mois, c’est vrai choc pour eux. Ils doivent faire un vrai travail de remise en question et tentent de comprendre pourquoi ils se retrouvent ainsi sur la touche.

  • Comment expliquez-vous le retard de la France en matière de recrutement des seniors?

Le phénomène est assez récent. Cela ne fait que depuis quelques années que nous avons tant de « papyboomers » à replacer sur le marché du travail. La tendance est par exemple moins nouvelle en Allemagne, où l’on a pris l’habitude de faire travailler les seniors parce qu’ils sont confrontés à ce phénomène depuis plus longtemps que nous.

Il faut aussi avouer que nous avons une vision moins flexible du travail que les Anglo-Saxons. Aux Etats-Unis par exemple, on laisse plus de chances aux seniors. Je remarque également que les barrières à l’emploi pour les seniors sont peut-être sensiblement plus importantes en région parisienne, où le dynamisme et la jeunesse sont souvent mis en avant. Mais je suis confiant, nous allons rapidement nous adapter car nous allons vers une période de forte pénurie avec des départs en retraite massifs d’ici les prochaines années.



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